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La Diagonale des fous, Cr de Philippe Le Gac, ‘« L’Ultra-trail , ça ne se raconte pas , cela se vit’

La Diagonale des fous, Cr de Philippe Le Gac, "« L’Ultra-trail , ça ne se raconte pas , cela se vit"

D’île en île.

« L’Ultra trail , ça ne se raconte pas , cela se vit » . C’est une phrase que j’avais lu par hasard, il y a quelques années. C’est vrai, cependant, j’ai envie au travers de ce récit, de vous raconter cette belle aventure personnelle et humaine.

En 2013, j’avais réussi à terminer mon premier ultra trail ( La Diagonale des Fous à la Réunion), après 2 tentatives infructueuses en 2011 (éliminé de l’UTMB à 25 km de l’arrivée) et en 2012 ( finisher de l’UTMB raccourci à 105 km pour cause de mauvaises conditions atmosphériques). Cette première réussite sur une course aussi dure m’avait secoué, car quelques années auparavant je n’imaginais pas pouvoir terminer ce type d’épreuve d’endurance, étant un coureur plutôt spécialiste de cross , piste et course sur route.

Aussi, en 2014, après avoir été recalé au tirage au sort de l’UTMB une seconde fois, j’avais besoin de prendre du recul et de ne pas programmer d’ultra-trail. Je savais que ma participation à l’UTMB 2015 était confirmée et j’avais aussi une très grande envie de refaire la Diagonale des Fous … Evidemment le doute s’est installé en moi les semaines qui précédaient l’inscription. 2 ultras en 2 mois : est ce bien raisonnable ? Mon ami Christophe O avait réussi ce pari fou l’année passée en doublant Grand Raid des Pyrénées et Diagonale. Pourquoi pas moi ? Le doute continue et le matin du jour J, je lis cette phrase : « Dans la vie, tu as 2 choix le matin : soit tu te rendors pour continuer à rêver, soit tu te lèves pour réaliser tes rêves ». C’est décidé, je m’inscris !

Commence alors la période de préparation en avril. Une semaine à Ouessant. J’apprécie beaucoup cette île sauvage à une heure de bateau du continent. Pas de dénivelée, mais des parcours que je trace selon mes souhaits du jour, dans un cadre exceptionnel ou la terre et la mer sont en parfaite harmonie. Quelques semaines plus tard, ne pouvant pas aller en stage avec mes amis du club, je décide de partir sur une autre île, en Corse pour faire le fameux GR20 en 5 jours et demi (180km et 14000m de d+). Expérience inoubliable sur ce parcours TRES physique avec un groupe de trailers , encadré après par Vincent Delebarre , Philippe et Théo dans une ambiance chaleureuse et conviviale . En juillet , je repars en Bretagne pendant 2 semaines pour finir ma préparation avant l’UTMB , avec des séances quotidiennes sur les sentiers côtiers .

Fin aout, c’est l’UTMB que je termine en 45h20. Très beau souvenir, une partie de la course avec mes amis Farid et Thierry L et une arrivée à Chamonix comme dans un rêve. Mon premier objectif est rempli. Maintenant, je sais qu’il faut que je récupère vite. 15 jours d’arrêt total. J’enchaine 3 sorties longues à Fontainebleau (3 h à 4h30). Je suis surpris de ma forme et apparemment j’ai bien récupéré. Une dernière séance de 20×120 marches à 10 jours du départ. J’ai des bonnes sensations et je suis prêt à y retourner.

Après Ouessant, la Corse, voici la troisième île : La Réunion.

Arrivée 2 jours avant le départ, je passe la première journée à me reposer du voyage de nuit (10 h). Lendemain, voyage en car vers St Pierre, lieu du départ et retrait des dossards. Assez détendu, je ne me fixe qu’un seul objectif : TERMINER.

Le 22 octobre, jour J, derniers préparatifs, dans l’après-midi un pot avec Marco qui fait aussi la course, dernier repas, derniers au revoir aux proches et la famille, des appels et des sms d’encouragements … La pression monte. Je me rends avec Brigitte au départ prévu à 22h00. Contrôle des sacs, attente pendant 1h 30 dans l’enclos des coureurs puis direction vers la ligne de départ avec un bon grain qui arrose le peloton pendant 15 mn.

Les 2500 « fous » sont lâchés enfin. J’avais décidé de partir plus vite qu’il y a 2 ans. En réalité, je n’arrive pas à me situer car la liesse de la foule qui se concentre pendant plusieurs kilomètres sur le front de mer entraine beaucoup de coureurs à partir très vite, voire trop vite. L’ambiance est extraordinaire. J’essaie de profiter un maximum du spectacle tout en restant concentré sur mon allure .Au bout de 2h, j’arrive au 14eme km premier ravito (1396ème). Tout va bien. Le peloton est encore dense et la température est plutôt douce. Je redoute un passage ou il y a 2 ans j’avais été bloqué par un bouchon. Premier ralentissement mais pas d’arrêt et 1h plus tard, dans un passage très étroit, un nouvel arrêt ; Je dois me couvrir car je sens que je me refroidis. Le peloton repart et nous commençons à prendre de l’altitude en devinant les lumières des villes et villages implantés en bord de mer. Et puis, à la sortie d’une forêt j’aperçois furtivement une lumière rouge à l’horizon. C’est le piton de La Fournaise, volcan qui est toujours en éruption. Le jour se lève .Nous sommes à 1700 m d’altitude et je me dirige vers Piton sec (km 34) que j’atteins à 5h22 puis Piton Textor (km 40 alt. 2165 m) premier point haut de la course, 1h plus tard (1261ème). Les paysages sont magnifiques. La partie de parcours qui suit sera difficile pour moi : 21 km en 6h avec, au début des parties roulantes ou il faut courir et ensuite, après Mare à Bout (km 50) l’ascension longue et technique vers Coteau Kerveguen et une descente de « ouf » vers Mare à Joseph. J’ai l’impression de ne pas suivre le rythme de la course et de me faire doubler. Pas d’explication rationnelle. Il fait chaud. Au pointage de Mare à Joseph, j’ai en effet perdu plus de 100 places (1397 ème). J’arrive une heure plus tard à Cilaos, ville du centre de la Réunion et gros ravitaillement (km 66). Philou H m’avait conseillé de ne pas m’y attarder : changement de tenue, un repas solide et je repars .Je sais que les difficultés arrivent avec l’ascension du Col du Taibit, point d’entrée du Cirque de Mafate. Je mets environ 2h pour faire les 6km jusqu’au pied du col. En effet depuis Cilaos il y a une très grosse descente puis une remontée. Il fait très chaud. Je bois beaucoup d’eau et avale une pastille de sel toutes les 2 h .Je vois plusieurs coureurs en difficulté. Encore 2h et demi pour faire 6km pour atteindre Marla ou j’avais dormi il y a 2 ans .Il fait encore jour. Je n’ai pas sommeil. Je continue vers le Col des Bœufs et Sentier Scout .La nuit est tombée. On devine les lampes frontales sans vraiment savoir où est le chemin. Alternance de grosses montées et descentes. Des marches, des marches avec à certains endroits des câbles d’acier pour se maintenir à la paroi !! La fatigue se fait sentir. Vers 1h du matin, j’arrive à ilet à Bourse. Je commence à avoir sommeil. Je m’allonge parmi d’autres coureurs dans l’herbe. J’ai froid .Je ne dors pas. Finalement, j’arrive à dormir 20 mn. Mon portable sonne et me réveille. Je repars avec une impression différente d’il y a 2 ans au même endroit ou j’étais dans un état moins lucide .Direction Grande Place Ecole , point bas du parcours (km 98 alt 560m ). On commence alors à voir le Maido, sortie du Cirque ( alt. 2030m km 112 ). S’ensuit une ascension interminable vers Roche plate et Maido (14km en 6h et demi) .Je suis au ralenti mais les autres aussi … A ce moment, je pense à tous les soutiens qui me suivent et m’encouragent et je me dis qu’il ne faut rien lâcher ! Malgré tout, je gagne des places (1126ème à Roche Plate et 1051ème à Maido). Plus de 2h d’avance par rapport à 2013.

J’entame le dernier tiers de la course par une descente de 14 km vers Sans Souci qui ne parait pas très difficile mais qui en réalité est interminable. J’alterne course à pied et marche. Beaucoup de poussières générées par les coureurs qui m’assèchent la gorge. Nous nous approchons des zones plus habitées. Les gens nous encouragent et doivent bien voir dans nos regards l’état de fatigue. Je suis de plus en plus confiant sur ma capacité à être finisher. Il y a 2 ans, dans cette partie du parcours, Rivière à Galet, Chemin Ratineau, la Cala jusqu’à Possession il faisait nuit et j’étais limite au niveau sommeil. Cette année, étant plus rapide, je découvre de nouveaux paysages. A Possession une foule compacte et joyeuse nous attend. On se trouve au niveau de la mer (alt 15m). Encore une centaine de places de gagné. Je vais arriver au Chemin des Anglais qui m’avait fortement marqué en 2013 (7 km sur des roches noires en devers, montée, descente). J’arrive sans problème à Grande Chaloupe (km 151). Dernière ascension de 700 m de d+. Je rencontre 2 coureurs Jaimy et Sébastien avec qui je parle. Ils connaissent bien le Grand Raid et la fin du parcours qui est un peu tortueuse en direction de Colorado et je décide de rester avec eux pour le final. A ce moment nous croyons pouvoir faire moins de 50 h. Avant d’arriver au sommet, la pluie arrive, de plus en plus dense. Arrivé à Colorado, on s’équipe avec notre coupe-vent car la dernière descente est plus exposée. Les 4 derniers kilomètres sont un enfer ! La pluie et le passage des coureurs ont labouré le chemin, déjà compliqué quand le temps est sec, avec des racines glissantes et des rochers. On a du mal à s’engager dans la pente .Je déploie une énergie folle pour rester debout .Un japonais fait une chute et ne se relève pas .Finish .Il veut arrêter car il a peur et on lui dit de continuer. Je fais 3 chutes et je suis couvert de boue .Mes collègues aussi. Malgré tout nous nous approchons du but. Nous apercevons Saint Denis et le stade de la Redoute. 2h 00 pour 4 km … J’appelle Brigitte pour lui dire que j’arrive. Il est presque 1h00 du matin. Je franchis la ligne avec Brigitte et Jaimy dans un temps de 50h57mn, 3h de moins qu’en 2013. Pari réussi ! Je suis simplement heureux !

Un Grand Merci à toutes les personnes qui m’ont soutenu et supporté avant, pendant et après la course (famille, 3F, amis, Asphalte94) ! Et à mes proches (Brigitte et mes enfants Caroline et Aymeric).

PS : je vais y retourner ….

Philippe Le Gac

 

 

 

 

 

 

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